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A jamais les premiers
16 décembre 2008

Retour sur... l'affaire Santos Mirasierra

2472389747_72e9163e76Santos Mirasierra, capo des Ultras marseillais, a vécu un calvaire pendant plus de deux mois. Aujourd'hui en liberté, il attend son procès en appel, qui devrait se tenir courant janvier, en Espagne. France 3 Méditerranée diffuse samedi 20 décembre à 16h45 un documentaire de 52', produit par Treize au Sud, qui retrace le déroulement de cette affaire de l'intérieur. L'occasion pour moi de revenir sur les faits, en expliquer les causes, et les conséquences.

Des blessés et une arrestation pour une simple banderole
Mardi 1er octobre. L'OM se rend à Madrid, au stade Vicente Calderon, pour le compte de la 2e journée de Ligue des Champions. La rencontre les oppose à l'Atlético. Avant le début de la rencontre, des incidents ont lieu entre supporters marseillais et forces de l'ordre espagnoles. À l'origine, une banderole. Une simple banderole, qui porte une tête de mort comme la photo ci-dessous.

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La tête de mort en question est l'emblème du Commando Ultra 84, et a fait le tour de l'Europe – y compris en Espagne – depuis plus de 20 ans. Mais voilà, pour la Guardia Civil, cette banderole est un appel au racisme, malgré son autorisation par la Ligue Internationale Contre le Racisme et l'Antisémitisme (Licra) et l'UEFA. Les policiers madrilènes demandent de la retirer, ce que les supporters marseillais tentent de faire. Ils n'en ont pas le temps, que déjà la Guardia Civil charge dans le tas. Les coups de matraque pleuvent. Les Marseillais ripostent en leur jetant des chaises. Les incidents durent plusieurs minutes (voir la vidéo plus bas). Ce n'est qu'avec l'arrivée du staff de l'OM que tout rentre dans l'ordre... Enfin presque.
La rencontre a lieu, l'OM s'incline 2 buts à 1. Tout le monde pense en rester là, sauf la police madrilène qui décide de ne pas se laisser faire. À la sortie des supporters olympiens et leur reconduite dans les cars, elle ressort les matraques. L'objectif : retrouver et arrêter Santos.

La solidarité entre supporters se met en place
mUb7FtckjBpU4iBX3rb6aa63nhkeUis7QuicklookDès l'arrestation de Santos, les Ultras publient un communiqué sur leur site. Santos est en détention préventive pour
« violences contre les forces de l'ordre » et « trouble de l'ordre public ». Un policier madrilène aurait identifié le capo des Ultras comme l'auteur d'un jet de chaise envers un de ses collègues. Santos, lui, clame son innocence. La mobilisation prend place à Marseille, où les premières banderoles clamant la liberté de « Santi » sont déployées au Vélodrome. Les jours passent, Santos est toujours incarcéré à Madrid. La nouvelle reste cependant assez confidentielle. Il n'y a qu'à Marseille et dans certains stades d'Europe (Belgique, Grèce, Espagne) qu'on parle de l'affaire Santos. Seuls les média locaux (La Provence, LCM et France 3) s'en emparent. C'est surtout sur le net que la mobilisation se cristallise: sites, blogs, messages de soutiens divers et ventes aux enchères dont les profits aideront à payer les frais d'avocats. Les Ultras appellent à un envoi massif de lettres pour que Santos ne se sente pas seul en cellule.

Côté espagnol, c'est la satisfaction
À l'image des média français, les politiques restent discrets, notamment le secrétaire d'Etat Bernard Laporte. De l'autre côté des Pyrénées, en revanche, on met le paquet. Engluée dans des affaires de racisme dans les stades, l'arrestation de Santos est une aubaine. Dès les premiers jours de sa détention, la justice le présente comme un
hooligan, et n'hésite pas à se satisfaire de sa condition, qui signe une franche victoire contre la violence dans les stades. Les média espagnols y vont aussi bon train, Marca et As notamment, avec des propos plus que provocateurs envers la France et surtout Marseille. Les Ultras y sont décrits comme les supporters « les plus violents en Europe. » El Mundo Deportivo titre en Une : « Marseille, une ville sans loi ».

Une enquête qui dure et un procès qui peine à venir
Malgré de nombreux documents et témoignages fournis, en partie par
Canal Plus Espagne, l'enquête met du temps à  être bouclée. La faute à des témoins espagnols qui se contredisent. Le policier qui avait identifié Santos comme le lanceur de siège sur un de ses collègues assure que celui-ci était rouge. Or les vidéos montrent qu'une chaise a bien été envoyée sur un policier, mais elle est blanche. Et surtout, à aucun moment, on y voit Santos la lancer. Malgré tout, cela n'arrête pas la justice espagnole. Le 6 novembre, soit plus d'un mois après l'arrestation de Santos, le procureur espagnol requiert huit ans de prison ferme pour « trouble de l'ordre public » et « attentat contre l'autorité publique » (chacune des peines est passible de 4 ans ferme). La nouvelle est difficilement accueillie par l'entourage du supporter, mais le procès n'a pas encore eu lieu.

La sanction tombe : trois ans et demi ferme
santosmenotte_400x325Mercredi 3 décembre. Durant toute la journée, le procès de Santos a lieu. Il se présente, menottes aux poings et en survêtem
ent de l'OM. De nombreux témoins viennent témoigner. À la fin de la journée, la parole est donné à l'accusé. Plein d'émotion, il déclare, en espagnol : « Je suis innocent. Depuis 20 ans j’ai suivi l’OM partout, c’est toute ma vie je ne peux pas vivre sans ça. Tout mon temps, mon argent, mes vacances, je les consacre pour suivre l’équipe aux quatre coins de l’Europe. J’ai toujours lutté contre toutes formes de violence et de racisme. C’est vrai que je suis un Ultra, mais je ne suis ni un hooligan ni un criminel. »
L'avocat général, malgré l'absence de preuves matérielles, maintient l'accusation :
« troubles à l'ordre public » et « violences en réunion envers l'autorité ayant entraîné des blessures » et requiert huit ans de prison ferme. Vendredi 5 décembre, le verdict tombe. Santos écope de trois ans er demi de prison ferme. Une sanction lourde, disproportionnée au vu de l'absence de preuves tangibles. Le juge reconnaît lui-même, ne pas être en mesure de le prouver. Il fait valoir la jurisprudence qui « permet d'attribuer le résultat d'un acte à tous ceux qui sont intervenus pour le commettre ». Autrement dit, Santos n'est pas coupable, mais est tout de même condamné...

Incompréhension en France
Les avocats, la famille, les dirigeants de l'OM ainsi que l'ensemble des supporteurs, sont sous le choc après cette décision. Me Collard, avocat de la famille Santos, a déploré le
« caractère déraisonnable » et la « sévérité inouïe » de cette décision, dans une déclaration à l'AFP. Pape Diouf, président de l'OM, « Je ne pensais pas qu’une telle injustice soit possible dans une capitale européenne comme Madrid. C’est insupportable et effrayant. » L'avocat de Santos en Espagne, Me Ibarrondo-Merino, est lui aussi, abasourdi : « c'est hallucinant, ils reconnaissent qu'il n'a pas lancé de siège, ce qui était tout de même la raison pour laquelle il était en prison préventive. »

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Liberté sous caution et match sous haute-tension
Dans la foulée, l'ensemble des supporters se met d'accord pour que la réception de l'Atlético ne tourne pas à la catastrophe. Mais beaucoup craignent d'éventuels débordements isolés. Les Ultras, appellent au boycott de la rencontre et préfèrent se mobiliser en dehors du stade. La décision sera annulée lorsqu'on apprend que Santos obtient la liberté sous caution (6000 euros) le 8 décembre, après 70 jours de détention en Espagne. Finalement, le match se déroule sans accrocs, les deux équipes se quittent sur un score nul et vierge. La joie se lit sur tous les visages, mais la lutte n'est pas terminée. Santos est toujours condamné à une peine de trois ans et demi de prison, dans l'attente de son procès en appel. L'affaire n'est pas encore terminée.

PS : voici un reportage diffusé sur L'EquipeTV sur Santos, produit par Treize au Sud.


Reportage SANTOS

Sources : La Provence, OM.net, L'Equipe.fr

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